Les connaissances, compétences, attitudes et comportements que l’on souhaite favoriser chez les élèves sont typiquement consignés dans les programmes scolaires ou sous forme de standards (nationaux et internationaux, voir ci-dessous), ou encore sous forme de référentiels ou de grilles (« rubrics » et « grids » en anglais, voir parties ci-dessous). Les référentiels peuvent venir compléter les programmes scolaires ou être élaborés par un établissement scolaire, un groupe d’enseignants, un organisme de formation, un producteur et fournisseur de ressources pédagogiques…
Les standards et les référentiels servent à leur tour de guides pour la production de grilles critériées d’évaluation et de notation.
Qu’est-ce qu’un standard ?
En éducation, la notion de standard revient à décrire ce que les élèves sont censés apprendre et ce que les enseignants sont censés enseigner, c’est-à-dire le curriculum. Les évaluations basées sur les standards mesurent le niveau d’acquisition des connaissances et des compétences. Le résultat d’une évaluation peut être rapporté sous forme de notes ou équivaloir à un passage au niveau suivant. Il existe donc, associée à celle de standard, une notion d’acquisition minimale, de seuil pour déclarer un élève suffisamment compétent dans un domaine. Les standards sont fortement associés aux curricula nationaux dans les différentes disciplines, car ils définissent ce que les élèves sont censés apprendre à un niveau particulier d’éducation.
En France, les curricula ou programmes scolaires de l’enseignement des sciences définissent des attendus faisant partie du socle commun de connaissances, de compétences et de culture établi comme objectif pour tous les élèves entre 6 et 16 ans.
Les programmes spécifient les connaissances et les compétences à travailler pour atteindre les objectifs du socle commun, et sont accompagnés de ressources pédagogiques pouvant illustrer des mises en pratique possibles.
Il existe aussi des standards internationaux, définis en sciences par des organismes tels que la IEA (pour les standards relatifs aux évaluations Timss) et l’OCDE (pour les standards des évaluations PISA). Cependant, l’objectif de ces standards et de ces évaluations ne devrait pas être confondu avec celui des standards nationaux, car l’objectif principal des évaluations internationales est une évaluation comparative entre systèmes éducatifs.
Outil MAPÉVAL - Connaissances et compétences visées
Le dispositif MAPÉVAL se base sur les programmes scolaires français et fait notamment référence à ceux-ci pour tout ce qui concerne l’évaluation des connaissances et les attendus, en termes de compétences scientifiques. Cependant, l’évaluation des compétences se base sur un référentiel détaillé qui inclut également des éléments de culture scientifique et d’esprit critique en lien avec les sciences.
Qu’est-ce qu’un référentiel ?
Un référentiel est généralement un ensemble de lignes directrices (une grille de critères), utilisé pour promouvoir une application cohérente des attentes, des objectifs ou des normes d’apprentissage et pour en mesurer la réalisation. Un référentiel peut donc être utilisé à la fois pour déclarer des objectifs attendus et pour servir de base à leur évaluation.
Un exemple de référentiel des compétences scientifiques, inclus dans l’outil MAPÉVAL
La frise des grandes étapes ou savoir-faire de la démarche scientifique permet de se rappeler les grandes catégories de savoir-faire et de compétences à maîtriser progressivement, dans différents contextes et par rapport à différents contenus. Ceux-ci sont regroupés dans un référentiel des compétences liées à la démarche scientifique. Chaque compétence est rapportée sur des supports à mobiliser en classe, afin de rendre les élèves conscients des savoir-faire et des compétences travaillées.
À cela s’ajoutent un référentiel et des cartes relatifs aux gestes professionnels mobilisés par l’enseignant pour favoriser l’acquisition des savoir-faire et des compétences correspondantes.
Qu’est-ce qu’une grille d’évaluation ?
Une grille d’évaluation est un outil qui rend explicite une série de critères d’évaluation normés, en lien avec les performances attendues. De cette manière, elle aide les enseignants à appliquer des normes cohérentes lors de l’évaluation. Les grilles peuvent comporter des niveaux de progression (échelle de niveau) et des éléments gradués qui permettent d’aboutir à une note (échelle de notation).
Les grilles d’évaluation peuvent être conçues pour n’importe quel domaine et être utilisées pour évaluer l’apprentissage à tous les niveaux.
Elles constituent un outil communément utilisé dans le cadre des approches éducatives dites fondées sur les résultats ou sur les objectifs*, tout comme dans les approches dites par compétences**.
(Pour des exemples de grilles d’évaluation, voir partie "Où trouver des lectures pour justifier les propos de cette page ?")
*L’éducation basée sur les résultats ou les objectifs est une théorie éducative qui se fonde sur l’idée de fixer des objectifs à atteindre pour chaque élève. Les objectifs (ou standards ou compétences à atteindre) sont des comportements ou des réponses observables et mesurables. Les objectifs déterminent avec précision le résultat souhaité, au terme d’un processus d’enseignement. Ils permettent donc de concevoir des curricula, mais également des épreuves d’évaluation standardisées, basées sur des listes d’objectifs d’apprentissage, ordonnés selon des taxonomies précises. La plus connue est celle proposée par Benjamin Bloom en 1956. On y constate une hiérarchie d’objectifs de complexité croissante. L’élève est donc progressivement exposé à des problèmes de plus en plus complexes et évalué en relation avec des objectifs de niveau cognitif de plus en plus haut. On peut retrouver ce type d’approche dans les évaluations Timss, qui sont organisées autour de trois grands domaines cognitifs : connaître, appliquer et raisonner. Les méthodes basées sur les résultats ont été adoptées dans les systèmes éducatifs du monde entier, à différents niveaux. Parmi les plus connus, le programme américain, qui a donné lieu en 2016 aux National Science Education Standards. Les avantages des standards ou des objectifs clairement identifiés se réfèrent notamment au fait de pouvoir facilement identifier les buts à atteindre dans le cadre d’un apprentissage et de pouvoir facilement concevoir des épreuves standardisées avec un haut niveau de validité et de fidélité. Ces dispositifs favorisent notamment l’évaluation sommative et certificative. Ce modèle a cependant reçu de nombreuses critiques, notamment du fait que :
- les objectifs sont, dans la plupart des cas, très nombreux ;
- les objectifs d’un certain niveau ne sont pas connectés entre eux – chaque objectif fait l’objet d’une évaluation à part et n’a pas de liens explicites avec d’autres objectifs qui concourent pourtant à préparer l’élève à passer à un niveau supérieur de compétence ;
- les objectifs ne spécifient pas comment atteindre les résultats attendus.
**L’approche par compétences porte une attention particulière aux référentiels de compétences, qui en constituent un outil essentiel. L’évaluation y est plutôt conçue comme une évaluation de type formatif (mais pas uniquement). Une compétence (« competency ») associe connaissances, savoir-faire ou habileté (« skill ») dans le but de savoir agir. Au centre de cette approche se trouvent l’idée de tâche complexe à accomplir (l’agir) et celle de la capacité à mobiliser, à utiliser et à transférer une compétence pour la réalisation de telles tâches. Par conséquent, l’évaluation ne se limite pas à observer si un objectif est atteint, mais porte sur la maîtrise des ressources nécessaires pour résoudre la tâche. Ces ressources sont variées : les savoirs comprennent les connaissances factuelles, mais aussi celles procédurales, conceptuelles, métacognitives ; aux savoir-faire sont associés aussi des savoir-être ou des attitudes. La notion de compétence incluant en plus celle de transférabilité à de nouveaux contextes et situations, les critères d’évaluation sont multiples et doivent porter sur des situations réelles, avec leur contexte (les contextes, et donc les situations d’évaluation, devant être variés). Il ne faudrait pas confondre (mais cela arrive souvent dans les programmes ou les curricula) les compétences au sens propre et les connaissances ou les savoir-faire. Par exemple, savoir écrire une formule décrivant une réaction chimique n’est pas une compétence à proprement parler, mais une connaissance, ou alors un savoir-faire. Il est important de définir comment observer si les compétences sont maîtrisées et à quel niveau, et donc de définir des indicateurs et des observables auxquels se référer pour évaluer. Or, une compétence est au fond une potentialité, au sens où elle peut s’exprimer de manière différente en fonction du contexte et qu’elle n’est pas immédiatement visible. Par exemple, un même élève peut faire montre de l’utilisation correcte d’une compétence liée à la démarche expérimentale (comme proposer un protocole expérimental) dans un cadre spécifique, semblable à d’autres cas déjà rencontrés, mais ne pas être capable de définir un protocole en relation avec un contenu non familier. De même, l’élève peut réussir à faire montre de ses compétences lors d’une évaluation sans enjeu, et ne pas réussir à les manifester dans le cadre d’une épreuve notée et avec enjeu. Évaluer des compétences est donc beaucoup plus difficile qu’évaluer des résultats. La maîtrise d’une compétence comportant le fait de savoir la mobiliser dans diverses circonstances, ceci implique pour l’élève de se rendre progressivement moins dépendant du contexte. Il est donc important de multiplier les observations de la même compétence pour un même élève dans des contextes différents. Enfin, la notion de compétence étant destinée au transfert dans la vie réelle, les moyens pour l’évaluer doivent faire référence à des situations complexes et aussi réalistes que possible. Or, ceci est particulièrement difficile lorsque l’on doit concevoir des tâches d’évaluation qui font référence à des situations réelles, mais qui s’adressent à des élèves au début de leurs apprentissages. Pour toutes ces raisons, l’approche par compétences est complexe non seulement dans son évaluation, mais également dans sa mise en pratique.
L’approche par compétences peut être considérée comme un développement de l’approche par objectifs, ou comme une conséquence du passage d’approches de type behavioriste (où ce qui compte est le résultat final observable) à des approches cognitivistes, éventuellement socioconstructivistes. Les bases scientifiques des deux approches pédagogiques restent à établir, ainsi que leur efficacité. Le rôle des grilles est le même dans les deux approches, mais change les formulations des critères utilisés comme référence pour l’évaluation. On peut ainsi retenir des aspects communs aux deux approches, en relation avec les problématiques d’évaluation :
- l’importance de fixer des objectifs clairs et bien définis ;
- celle d’identifier, via l’évaluation, le niveau de maîtrise ;
- avec une visée d’utilisation et de transfert.
Quelles sont les composantes d’une grille ou d’un référentiel pour l’évaluation ?
Lorsque l’évaluation repose sur des grilles critériées, celles-ci doivent comprendre des critères d’évaluation, des indicateurs – à leur tour renseignés par des observations ou des mesures, éventuellement des échelles de progression (voir tableau ci-dessous pour une explication de ces termes ; voir les encadrés plus bas pour des exemples concrets). Il faut souligner qu’une évaluation n’est pas un processus mécanique et que les indicateurs une fois collectés sont soumis à interprétation. Par exemple, s’il y a plusieurs indicateurs portant sur un même critère, l’élève peut valider certains de ces indicateurs uniquement. En outre, l’évaluation ne se termine pas par l’interprétation, mais doit donner lieu à une restitution, à un retour aux élèves.
Critères d’évaluation. Il s’agit des qualités recherchées, en lien avec la tâche visée ou l’objectif à atteindre ; par exemple, le fait de savoir reconnaître un protocole expérimental rigoureux, de savoir en proposer un ou, finalement, de savoir le mettre en œuvre constitue un ensemble de compétences liées à la démarche scientifique.
Indicateurs. Les critères n’étant pas directement observables, il est important de se poser la question de comment on pourra réellement et concrètement en observer/mesurer la réalisation. Il est alors nécessaire d’identifier pour chaque critère des indicateurs qui spécifient de manière non ambiguë comment les attentes se traduisent dans la réalité. Par conséquent, les indicateurs indiquent à l’évaluateur ce qu’il doit observer ou mesurer pour qu’un élève valide un critère. Les indicateurs doivent également être compréhensibles par les élèves afin de rendre explicites les attentes (voir partie "Quels bénéfices pour l'élève ?").
On peut faire une distinction générale entre indicateurs observables – comportements, réponses aux questions, qualité du geste – et indicateurs qui peuvent être mesurés – nombre de réponses correctes, taux de réussite à un examen en classe…
Outils d’observation et de mesure. Les indicateurs ne sont pas « autonomes ». L’évaluateur doit collecter des données – et cela peut se faire de différentes manières, à partir de différents types de productions et de tests. Le passage des critères aux indicateurs fournit le squelette et la structure des évaluations. L’indicateur est donc le résultat d’un agrégat d’éléments que les évaluateurs rassemblent. Les interrogations, sous forme de questionnaires (ouverts ou fermés), les observations d’écrits, les observations de classe, les interactions professeurs-élève(s) ou élève(s)-élève(s) constituent autant de modalités de collecte des informations en relation avec la grille d’évaluation et ses indicateurs.
Par exemple, dans le cadre des objectifs liés à la maîtrise progressive de la démarche d’investigation, une compétence fondamentale consiste à savoir collecter des données, via différentes modalités, dont l’observation. Cette dernière doit être préparée, puis menée de façon précise, détaillée, en utilisant les instruments et les moyens les plus adaptés, et de façon à limiter les biais (par exemple, grâce à la multiplication des observations). La compétence « Savoir collecter des données via l’observation » se divise donc en plusieurs sous-compétences spécifiques, à leur tour rendues observables ou mesurables grâce à des comportements (gestes, communication orale ou écrite), à des réponses à des questions… Ainsi, pour renseigner les indicateurs, l’enseignant pourra observer le comportement des élèves pendant les activités de classe et voir si les actions accomplies correspondent à celles décrites dans le référentiel au niveau des indicateurs ou des observables. L’enseignant pourra également consulter les écrits des élèves, dont le cahier d’expériences qui est rempli pendant les investigations, pour vérifier si les éléments recherchés sont présents. Enfin, il pourra vérifier le niveau de maîtrise de la compétence via des interrogations orales ou écrites qui amènent les élèves à s’exprimer de façon plus ou moins libre.