Document pour la formation des enseignants
Déroulement
I) L’activité de formation
Demander: « A votre avis, quels sont les fruits qui flottent dans l’eau et quels sont ceux qui coulent ? »
1. Exploration libre avec les fruits
- prévisions individuelles avec leurs justifications (cf. fiche individuelle)
- discussion dans chaque groupe sur les prévisions faites par chacun, et sur les justifications, puis prévisions du groupe (cf. la fiche de groupe) pour tous ou certains fruits sur lesquels il n’y a pas consensus
- mise en commun des différentes prévisions de groupes et discussion collective (avec argumentation) sur les justifications de chaque groupe
- vérification par l’expérience, au sein de chaque groupe
- dans chaque groupe, validation ou infirmation des prévisions (noter les résultats sur la fiche de groupe) avec observations et recherches d’explications par rapport aux attendus
- mise en commun des groupes : échange sur les résultats observés des expériences, comparaison des explications fournies par chaque groupe
Après cette période d’exploration entièrement libre, les stagiaires en viennent à préciser leurs questions
Observations qui suscitent l’étonnement :
- le grain de raisin (petit et léger) coule alors que la noix de coco (massive et plus lourde) ou la noisette (d’un poids équivalent au grain) flottent
- certaines bananes ou poires coulent, d’autres flottent (selon la variété, la densité n’est pas la même), on peut même observer certaines parties d’une même banane « couler » (partie plus mûre) pendant que d’autres flottent (partie moins mature)
- certains fruits flottent « entre deux eaux »
Remarque
- Le plus souvent les participants pensent que les fruits « gros et lourds » coulent et que les fruits « petits et légers » flottent.
2. Investigation guidée
Chaque groupe essaie d’aller plus loin, le formateur passe cette fois parmi eux, il guide les échanges en posant des questions, il oriente éventuellement les recherches ; il incite les stagiaires à formuler leurs hypothèses, à les écrire avant de les tester, par exemple, si
« je pense que la noix de coco flotte parce qu’elle contient de l’air, j’ouvre la noix de coco »
- temps d’investigation, par expérimentation sur les fruits, avec prise de notes des diverses actions ou suite d’actions afin de garder une mémoire du cheminement de sa pensée et des hypothèses qui se construisent au fur et à mesure
- mise en commun collective (c'est-à-dire de l’ensemble des groupes) des observations, des remarques, des actions réalisées lors de la manipulation
- recherche collective sur les observations menées et certains variables en jeu
Exemple d’actions et d’observations que certains adultes tentent de réaliser pendant l’investigation, pour vérifier leurs hypothèses :
- tester (comparer) avec des fruits de différentes couleurs, de différentes formes pour s’apercevoir que….
- enlever la peau, l’écorce (banane, orange…). Par exemple, quand on presse une peau d’orange sous l’eau, on voit apparaître des bulles d’air ou quand on enleve la peau du pamplemousse, s’apercevoir qu’il coule et se demander pourquoi, etc
- presser le fruit (la coque ou l’écorce d’un fruit par exemple) et observer les bulles d’air qui s’échappent et remontent à la surface (châtaigne, tamarine, orange ou pamplemousse (partie blanche de leur peau), d’où existence d’air
- secouer un fruit et entendre la graine se déplacer à l’intérieur de sa coque (noisette) (il y a donc de l’air dedans)
- ouvrir, éplucher, couper (noix, noix de coco…)
- comparer les masses de ces fruits en les pesant à l’aide d’une balance à plateaux (grain de raisin avec noisette, pomme avec poire…)
- estimer le temps que met un objet pour couler (éventuellement mesurer sa vitesse au chronomètre), observer la manière de couler (en zig- zag, à la verticale, en tourbillon, il flotte puis se remplit d’eau puis coule brutalement…ce dernier point expliquant pourquoi le Titanic a coulé….
Constat :
- Les observations ont permis de mettre en évidence des variables en jeu dans la flottabilité. Mais les enseignants à ce moment, ont une compréhension limitée des phénomènes observés et peuvent être déstabilisés par les questions qu’ils se posent.
- En effet, tous les fruits utilisés sont des matériaux organiques et inhomogènes, ce qui rend difficile l’analyse du phénomène, analyse qu’il n’est pas choisi de faire ici. Pour avancer, il est néanmoins utile de pouvoir construire quelques règles générales simples qui concernent la flottabilité d’objets homogènes.
3. Suite de l’investigation
Des objets du quotidien, comme des cure-dents, des capsules de bouteille, des trombones, des aiguilles à coudre, des boutons (soit en tissu, soit en bois, soit en fer, soit en plastique…), des bouchons en liège, des élastiques et des pinces à linge, sont maintenant proposés.
Ces objets vont-ils couler, vont-ils flotter ? On peut proposer une investigation, sur le même modèle que lors de la situation avec les fruits (prévisions justification vérification par l’expérience) puis une discussion collective.
Comme on le constate, tous ces objets sont homogènes sauf la pince à linge. Cependant, en la démontant, les participants constateront que la partie métallique homogène (séparée du bois) coulera alors que la partie bois (homogène) flottera.
Ainsi, il sera possible, dans un premier temps, d’établir une liste de matériaux homogènes qui « coulent » et une liste de ceux qui « flottent ».
Ensuite, il sera possible de s’apercevoir que, dans certaines conditions, un matériau qui habituellement coule, peut flotter (par exemple en modifiant sa forme en créant un creux et donc le volume de l’objet ainsi crée).
Cette situation focalise l’attention sur les différents matériaux dont les objets sont composés, facteur qui a une influence la flottabilité.
Toutes les manipulations réalisées enrichissent le répertoire d’expériences de chacun et permettent de collecter de nombreuses observations, sources de questions ;
- certaines peuvent être exploitées immédiatement (par exemple, ce qu’a dit un stagiaire : « j’observe par le sens de l’ouïe que j’entends un bruit quand je secoue la noisette, c est donc que la graine a de la place pour bouger et se cogner contre les parois, je peux donc penser qu’il y a de l’air dans la coque et que cet air a une incidence sur le fait que le fruit flotte »).
- D’autres, qui font appel à la notion de densité, feront l’objet d’une exploitation pédagogique progressive.
4. Un défi
Objectif du défi: se centrer sur une variable en étudiant l’influence de la forme d’un matériau homogène (en créant par exemple un creux, ce qui permet d’obtenir, par introduction d’air, un objet dont le volume peut varier en fonction de la forme ) sur le fait qu’un objet flotte ou coule.
- montrer une boule de pâte à modeler au groupe
- demander : « que va t-il se passer quand cette boule de pâte sera dans l’eau ? »
- chacun fait ses prévisions
- vérification (la boule coule)
- défi : « faites flotter cette pâte à modeler qui coule »
- expérience (en groupes)
- présenter les résultats de chaque groupe (par les porte-parole), éprouver l’efficacité de la flottaison (les poser dans l’eau, les observer, décrire les formes réalisées) et rapporter les difficultés rencontrées lors de la réalisation : il s’agit de changer la forme en faisant un creux et non un trou.
Conclure sur le fait que la forme d’un matériau homogène (telle qu’elle a été définie plus haut) est un des facteurs qui influence la flottaison
Attention : Il peut arriver qu’un stagiaire prépare une lamelle très mince de pâte à modeler qui, oh, surprise, flotte. Si elle flotte c’est à cause de la tension superficielle de l’eau ;on trouve le même phénomène avec une aiguille à coudre posée horizontalement et délicatement sur l’eau : elle peut flotter, alors que mise verticalement dans l’eau, elle coule. Dans ces expériences avec les objets, la « tension superficielle » de l’eau peut être observée (par exemple, si on décolle délicatement de l’eau un petit morceau fin de caoutchouc (latex) , qui flotte à sa surface , on s’aperçoit qu’avant de se séparer ou de se désolidariser de l’eau, ce morceau « colle » et « tire » ou « entraîne » avec lui la surface de l’eau,, d’où la remarque un jour d’un élève : « oh maîtresse, on dirait que l’eau, elle a une peau » ; enfin, chacun a pu remarquer que certains insectes comme les gerris se « posent » ou « marchent » sur le film de l’eau. Cette observation de la tension superficielle, qui traduit un comportement particulier de la surface de l’eau doit alors être isolée des autres observations liées à la densité des objets.
5. Bilan et perspectives
Objectifs visés pour les stagiaires :
être capable d’identifier certaines variables en jeu dans la flottabilité et approcher la notion de masse volumique, éventuellement de densité.
avoir des idées de séquences possibles, à partir de cette mise en situation.
repérer les différentes phases d’une démarche d’investigation.
Bilan
- à partir de toutes les observations qui ont été faites, une synthèse est construite collectivement avec le formateur:
- une affiche est d’abord rédigée sous la forme d’une liste des variables qui ont été identifiées
- un énoncé de conclusions peut être rédigé qui pourra rendre compte des observations significatives, des variables identifiées ainsi que des interactions de ces variables, qui influencent la flottabilité d’un objet dans un liquide (est sous-tendu principalement le rapport volume/masse des objets, qui pourra être évoqué)
Variables identifiées lors de cette séance :
- nature du matériau (organique, non organique/ homogène, inhomogène/ plein, creux/ de telle ou telle matière)
- forme (du creux dans un matériau homogène) et sa conséquence sur la flottabilité
- masse
- présence ou non d’air
Pour clore le bilan, faire repérer les différentes phases de la démarche d’investigation, telle qu’elle a été vécue (observation, description, questionnement, hypothèses, expérimentation, interprétation, communication)
Perspectives possibles
Juste après cette activité de formation, il est intéressant, avec les stagiaires, d’échanger sur les perspectives possibles d’un travail tel que celui-ci en relation avec la densité des liquides ou des solides.
Pour exemple, voici quelques pistes possibles :
La notion de masse volumique étant liée au rapport qui existe entre masse et volume d’un matériau, il est possible d’approfondir l’investigation, à partir cette fois d’Objets homogènes pleins (sans creux) ; par exemple :
- en comparant un même matériau avec différents volumes et masses (des sphères, des cubes ou d’autres formes, plus ou moins volumineuses, fabriqués à partir d’un seul matériau)
> si on utilise du polystyrène expansé, on s’apercevra que même avec une grande variation de volume, cette matière (des boules par exemple) continue de flotter, ce n’est donc pas seulement le volume qui « compte » pour la flottaison d’un objet
> avec de la pâte à modeler, on s’apercevra que, même avec une grande variation de masse, la boule de pâte à modeler, (même petite), coule, ce n’est donc pas seulement la masse qui « compte » pour la flottaison d’un objet
- on peut isoler une variable en observant et comparant par exemple des objets de même volume mais de masse différente (en prenant des petites boîtes contenant des pellicules photos , soit 5 cylindres de tailles et volumes identiques mais de masses différentes) ou encore des objets de même masse mais de volume différent (par exemple 5 cylindres de 5 tailles et volumes différents (du plus long au plus court) mais de masses équivalentes (vendus dans le commerce). Il est en effet important de faire comprendre aux élèves la différence entre une perception subjective : « c’est lourd » ou « c’est léger » et une mesure objective de la masse d’un objet, qui valide la comparaison.
- puis la comparaison d’objets, exactement de même volume, mais de masse différente, comme des cubes ou sphères en polystyrène, bois, verre (prendre par exemple une grosse bille), plomb ou acier, plastique (balle de ping-pong…), permettra de constater qu’à volume équivalent , la masse joue un rôle important
- la comparaison d’objets, de même masse et de volume différent permettra d’en déduire qu’à masse égale, le volume joue également un rôle important.
Tout ceci devrait permettre d’établir une relation qualitative entre masse et volume et approcher concrètement la notion de masse volumique des objets, puis celle de densité dès que l’on met ces objets dans l’eau.
Pour aller plus loin avec des élèves, ceci supposerait qu’ils sachent mesurer des masses et des volumes, et qu’ils aient acquis le concept d’air. En effet, des objets (comme la noisette, un bateau…) sont des objets comprenant divers matériaux et de l’air.
Autre piste de travail, avec des liquides :
- Autre variable à prendre en compte: la nature du liquide utilisé pour explorer la flottabilité d’objets. Demander ce qui se passerait si on mettait ces objets dans d’autres liquides que de l’eau….
- Travailler la notion générale de masse des liquides, en comparant des petites bouteilles (ou autres contenants identiques) remplies d’eau, de sirop, de miel liquide, d’huile ou d’alcool, avec l’aide d’une balance ; plonger éventuellement de petits objets dedans pour faire le lien entre la flottabilité de ces objets et la nature du liquide dans lequel ils sont immergés et peut-être revenir sur l’idée que « l’huile flotte sur l’eau »
Pour en savoir plus :
Définition de la masse volumique :
Un objet ayant une masse M et un volume V a une masse volumique M/V
Définition(s) de la densité :
La densité d’un matériau est le rapport de la masse volumique de ce matériau à celle de l’eau. C’est pourquoi la densité de l’eau est égale à 1.
Wikipédia : « la densité d’un corps est le rapport entre sa masse volumique et la masse volumique d’un corps de référence (l’eau pour les liquides, l’air pour les gaz) »
*Rappelons que l’objectif n’est pas de « donner » en situation de formation une définition toute faite mais de permettre aux enseignants et/ou formateurs de construire la leur qui ne soit pas en contradiction avec la définition scientifique.
Pour exemple :
Liège :- masse volumique :0,22g/cm3 , densité :0,22
Alcool (éthanol) :- masse volumique 0,80g/cm3, densité : 0,80
Huile d’olive : - masse volumique :0,92 g/cm3, densité : 0,92
Glace :- masse volumique 0, 92g/cm3, densité : 0,92
Eau :- masse volumique : 1g/cm3, densité : 1
Glycérine : - masse volumique :1,26g/cm3, densité :1,26
Verre :- masse volumique : 2,40g/cm3 , densité :2,40
Aluminium :-masse volumique : 2,70g/cm3, densité :2,70
Fer :- masse volumique :7,86 g/cm3 , densité :7,86
Plomb :- masse volumique : 11,35g/cm3, densité :11,35
La densité du bois dépend de son humidité. On la donne en général pour un pourcentage donné de 12%.
bois très lourd (ébène) :1,1
bois lourd (chêne) : 0,80
bois léger (épicéa) : 0,5
Couler, d’après le Petit Robert, signifie « s’enfoncer dans l’eau ».
II) Evaluation formative
Le but est de faire réfléchir les enseignants et/ou formateurs sur ce qu’ils ont eux-mêmes appris lors de cette activité de formation
Dans un premier temps, on peut revenir sur l’objectif visé par cette mise en situation avec les fruits : les enseignants peuvent dire qu’elle a permis
- de susciter de la curiosité
- de mener des investigations (observations, prévisions, recherches, expériences, échanges…) à partir des questions que l’on se pose (cf précédent bilan)
- de trier les matériaux homogènes en matériaux qui coulent ou qui flottent
- de constater que les matériaux inhomogènes peuvent avoir des comportements très divers, en particulier si ceux-ci contiennent ou non de l’air
- d’avoir une première approche de la notion de densité
Puis on s’intéressera aux apprentissages qui ont été construits, en termes de savoirs (approcher ou approfondir ses connaissances sur la notion de densité des solides et des liquides) mais aussi en termes de compétences
- quant à la démarche d’investigation (observation, description, questionnement, prévision (ou hypothèse), expérimentation, interprétation, communication),
- quant à la maîtrise de la langue orale et écrite (poser aux enseignants des questions pour les guider:
- à quel moment a-t-on échangé, écrit ?
- pourquoi ? (ceci fera référence aux fonctions de l’oral, comme questionner, répondre, argumenter, convaincre…, aux fonctions de l’écrit, comme mémoriser, structurer, communiquer)
- quels types d’écrits peut-on réaliser ? (cela fait référence à leur forme : une phrase de prévision personnelle, un dessin d’observation ou schéma, une description, un résumé, un compte-rendu, un texte explicatif…)
- ont-ils le même statut ? (il y a une différence de statut entre des écrits personnels, des écrits de groupes, des écrits de la classe validés car ayant été confrontés au savoir scientifique)
- comment améliorer les compétences langagières de chacun? A l’oral ? A l’écrit ? (…)
- quant à l’autonomie et la coopération au sein des groupes (c’est la question des rôles et des responsabilités au sein du groupe, des entraides possibles, des complémentarités dans l’action…)
- fruits (par exemple pommes de différentes couleurs, bananes plus ou moins mûres, grains de raisin, poires, kiwis , citrons, châtaignes, noix, noisettes, noix de coco, pamplemousse)
- torchons et/ou papier essuie-tout / pâte à modeler
- balance à plateaux / 3 bouteilles de même volume et compte-gouttes ( eau / huile/ sirop ou miel) (facultatif)
- bacs à eau (1 par groupe), couteaux et assiettes en plastique
- fiches de travail individuelles et fiches de groupes, papier affiche et marqueur
vivre et s'approprier la démarche d'investigation à travers une mise en situation