Quelques questions sur la démarche lamap

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Quelques questions sur la démarche lamap

J'ai beaucoup navigué sur votre site et réfléchi sur la démarche. Quelques questions d'ordre général me viennent à l'esprit.:
La démarche lamap part-elle toujours de l'émergence de la conception des enfants? Un point de départ qui serait une situation de problème ou
une action serait-il contraire à la démarche lamap?
Je n'ai rien vu sur l'évaluation ! Quévaluer, quand, comment? La comparaison entre les conceptions initiales et finales suffit-elle ? Cette démarche est-elle transférable dans d'autres domaines d'enseignement ? Lesquels?

Mon 14/06/04 - 14:00
edith.saltiel@fondation-lamap.org

Bonjour,
En ce qui concerne la première question, je vous renvoie au guide de formation qui se trouve sur le site Eduscol à l'adresse suivante
http://www.eduscol.education.fr/D0027/default.htm
En effet, vous trouverez pages 7 et 8 des éléments de réponse. En gros, il est dit que les conceptions émergent en situation d'action, que la phase d'émergence n'est pas une fin en soi. Puis "si on estime qu'une part importante doit être traitée par des démarches d'investigation, il apparaît que les représentations (conceptions) sont fortement présentes non comme un objet d'étude en soi, mais comme la base intellectuelle que les élèves utilisent pour raisonner"
Ce qui signifie que faire émerger les conceptions n'est pratiquement jamais un point de départ. En revanche des situations problèmes (qu'est-ce que cest pour vous? je pose cette question car sur ce terme il y a des interprétations erronées dans lesquels les auteurs ne se reconnaissent pas), des situations déclenchantes, des défis... sont des points de départ.
En ce qui concerne l'évaluation, il y en a eu quelques-unes, soit à partir des évaluations nationales, soit en Seine-Saint-Denis soit en Loire-Atlantique ou encore à Bergerac. Vous trouverez un extrait de cela sur le site de l'INRP
http://www.inrp.fr/rencontres/je/2002/lamap.htm
Là vous irez consulter le document issu de Bergerac.
Cette démarche est transférable dans d'autres domaines d'enseignement, c'est ce qui se fait à Bergerac (en mathématiques, en instruction civique, etc..). Prenez contact avec les responsables du site de la Dordogne qui vous donneront des informations.
Bonne fin de journée!
Edith Saltiel

mer 16/06/2004 - 03:01
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Votre question est en effet utile, car la vogue de l'émergence des représentations enfantines à l'entrée d'une séquence ou progression d'apprentissage est encore aujourd'hui considérée comme un passage obligé.
Cette façon de faire relève de la conception suivante : le maître dispose de l'intérêt des enfants et commence par leur faire "sortir de la tête" ce qu'ils pensent à propos de tel ou tel thème ou objet de travail. De la sorte, on peut penser que ce maître sera à même de savoir comment faire évoluer ces représentations et qu'il conduira les enfants sur le chemin de "l'investigation" qui lui "ouvrira les yeux".

Or, ceci est encore une fiction : car on ne sait presque rien de "comment fonctionne le cerveau de l'enfant"... et surtout pas comment scientifiquement et "psycho-cognitivement" parlant on peut amener "directement" un enfant à penser autrement.

Par ailleurs, on sait que pour construire son savoir il faut "se poser des questions"... ou tout au moins s'interroger... ce qui n'est pas prévu par la démarche d'émergence "a-priori" des conceptions spontanées... qui sont posées comme un préalable à toute démarche.

Il s'en suit que vous donnez effectivement bien des contre-propositions - celles-là même que je mets en scène avec les maîtres qui travaillent avec moi - et qui reposent bien sur le questionnement comme point de départ. Bien sûr, les situations dites "problèmes" peuvent être issues de questions d'enfants... ou simplement posées par le maître à leur place - ce qui n'est pas gênant, car on sait que les enfants souhaitent avant tout être invités à chercher, et produire des réponses à des sortes d'énigmes, de paradoxes, de curiosités inexpliquées, etc. J'ai d'ailleurs pratiqué de cette façon pour le projet Sciences_en_ligne que je co-pilote depuis 3 ans... c'est dire que je crois sincèrement à la démarche par situations problèmes.
Ce qui ne veut pas dire que parfois, il n'est pas "rentable" (psychologiquement parlant) de commencer par l'émergence de représentations spontanées : par exemple, en cycle 2, il est intéressant de faire dire aux enfants ce qu'ils pensent de l'existence (ou la non-existence) de l'air dans la classe (cf. la progression "air"- cycle 2 du projet déjà indiqué). Et la suite utilisera des situations problèmes qui justement, mettront l'enfant en défaut par rapport à ce qu'il pense; ceci est une façon de se servir des représentations spontanées.
Je conseille d'utiliser les représentations initiales pour l'étude de phénomènes naturels (la chaleur, la lumière, l'air...) pour permettre aux enfants "d'entrer dans le thème" et ensuite construire des "rectifications" ou pas (cela dépend aussi des objectifs que vous visez).

Mais en règle générale, le discernement est de mise, et le repérage et lexploitation des conceptions initiales doivent obéir à un objectif précis et non être recherchés pour eux-mêmes (qui est trop souvent le cas).
Vous proposez aussi "une action". J'imagine que ce peut être une action "pour voir", ou "pour obtenir quelque chose"... afin de parvenir à d'autres savoirs (cela dépendra de vos objectifs, une fois encore).
Il est sûr que "fabriquer un objet en suivant une fiche technique" dont le seul objectif est de parvenir à l'objet construit ne présente guère d'intérêt en classe (en revanche, cela est fort possible pour un enfant, chez lui, en autonomie...) où l'enseignement vise à faire acquérir des contenus, des méthodes ainsi que des savoir-faire.
Généralement, le savoir-faire est un acquis "en plus" ou "avec" les autres acquis. L'école forme quand même aux savoirs conceptuels même si le savoir-faire pratique n'est pas à négliger.

Donc, oui pour démarrer un enseignement par une "action" à condition qu'elle suscite des questions, soulève des étonnements, des énigmes, etc, qui soulèvent ainsi des problèmes à résoudre... et là on se retrouve devant le cas de la "situation problème"' (cf. votre première suggestion).

Quévaluer ??
Il me paraît pauvre de se contenter d'évaluer un avant et un après (ce que je pense avant, puis après). Cette façon de poser l'évaluation me paraît quelque peu insuffisante... et je crois que c'est pour cela que vous la posez.

Je pense qu'il faut savoir ce que l'on veut enseigner pour connaître ce que l'on doit évaluer. Or, il n'y a pas que les contenus à enseigner; au moins à égalité figurent aussi les méthodes et démarches - qui sont des savoirs " méthodologiques" - à transmettre aussi à l'école : comment l'enfant va-t-il procéder pour savoir si un corps flotte ou coule ? Quelles expériences est-il capable d'imaginer, de concevoir ? Quels facteurs prend-il en compte dans telle ou telle approche ? Comment représente-t-il son travail ? de façon lisible pour tous ? Comment s'approprie-t-il les outils logiques (tableaux, graphiques, etc)? Vous voyez que l'on est loin d'une démarche presse-bouton du genre : ce que vous pensez d'abord... ce que vous pensez après (cf. les publicités : avant/après).

La position qui consiste à enseigner en suivant une liste d'objectifs me paraît contraire à la globalité de l'apprentissage : quelques objectifs principaux pour une séance, oui ! (un ou deux suffisent, répartis en contenus et/ou démarche), mais une liste exhaustive ne me semble servir à rien de sérieux car l'enseignant ne peut maîtriser trop de facteurs en même temps dans une classe.

Ce sera donc au maître de "hiérarchiser" ses objectifs principaux, de savoir comment les atteindre en mettant en place des situations de départ (problème ou pas... mais qui poseront des questions et ouvriront des recherches) : tout ceci se range sous la catégorie de la "Construction de savoir par l'enfant" avec la médiatisation du maître qui pilote la classe.
Il reviendra au maître de s'assurer que les enfants ont bien construit le(s) concepts ou relations attendues et mettra au point, une fois la progression achevée, des exercices, des recherches, des actions... permettant à lenfant de réinvestir ce quil a appris : en bref, tout ce qui, dans les réponses de lenfant, montrera qu'il a bien assimilé ce qu'il a construit.

Naturellement, cette démarche (celle que je viens trop rapidement de vous présenter) est transférable dans d'autres domaines; car élaborer ses propres solutions/réponses relève de TOUS les champs de savoirs.

Il reste que c'est à l'enfant (on dit l'apprenant en psychologie) d'être l'acteur de ce qu'il apprendra grâce au maître qui médiatisera les situations de classe pour cela. Et bien sûr, ces situations de classe seront, en sciences, des situations qui s'appuient sur des phénomènes de la nature.
Mieux vaut donc élaborer ses démarches en relation avec les buts de son enseignement et ainsi sortir des dogmatismes.

Pardonnez la longueur de cette réponse, mais votre question était en fait triple ou quadruple!

Claudette Balpe
didacticienne des sciences
claudette.balpe@wanadoo.fr

mer 16/06/2004 - 03:01
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