La tension de surface

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La tension de surface

Comment expliquer aux enfants que la surface de l'eau n'est pas toujours plane mais parfois bombée comme avant de déborder du verre ?

Thu 27/01/00 - 13:00

La question est un peu ambiguë : il y a 2 niveaux à considérer.
1) S'il s'agit seulement d'expliquer que la surface n'est pas toujours plane, il suffit de leur montrer/donner quelques exemples tangibles, tels que des gouttes de pluie sur une fenêtre, des gouttelettes de rosée sur une toile d'araignée ou sur des feuilles d'herbe, tôt le matin, la condensation de la vapeur d'une bouilloire...

2) L'explication scientifique est plus délicate. Sans entrer dans des détails de l'équation de Laplace, je pense qu'il faut invoquer le concept : généralement, une goutte de liquide se comporte un peu comme un ballon en caoutchouc (mince), rempli d'eau. C'est comme si la goutte de liquide était entourée d'une membrane élastique (strictement ce n'est pas élastique, mais ceci devrait aider à comprendre le concept) qui essaie de l'empêcher de "s'échapper". Cette membrane correspond à la tension de surface. Elle est faible pour l'huile, qui coule et "mouille" partout. Elle est forte pour l'eau (sans savon, qui l'abaisse), donc l'eau mouille moins bien que l'huile. Elle est très forte pour le mercure (attention, produit très toxique) ; ceci explique pourquoi le mercure échappé d'un (vieux) thermomètre cassé roule par terre en petites boules. La "membrane" est trop forte pour le laisser rester en contact le solide sur lequel il roule.

Mon 31/01/2000 - 02:01
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Réponse de Gérard Torchet :
Suite à la réponse très complète de Martin Shanahan, il est possible de proposer une expérience classique, à faire en classe, qui illustre le fait qu'à la surface de l'eau, tout se passe comme si se trouvait une membrane ou une "peau". Un trombone ou une aiguille, qui devraient couler compte tenu de leur poids, peuvent se maintenir en surface, si l'on prend quelques précautions pour les y installer. On pose d'abord en surface un morceau de Sopalin, ou mieux une feuille de papier à cigarette. On dépose ensuite délicatement l'aiguille sur le papier. On fait alors couler ce dernier lorsqu'il est imbibé d'eau, en l'enfonçant par exemple avec un crayon, sans toucher à l'aiguille. Celle-ci reste en surface et en regardant attentivement, on voit qu'elle enfonce (un peu !) la surface, comme une règle posée sur un édredon.
Suites possibles :

1. si l'aiguille est aimantée, on dispose d'une boussole.
2. si l'on verse un peu de détergent liquide (pour faire la vaisselle), la membrane ne peut plus retenir l'aiguille (le détergent a abaissé la "tension superficielle") et celle-ci coule.

Mon 31/01/2000 - 02:01
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J'aimerais compléter les deux très bonnes explications fournies par nos collègues, en faisant remarquer que la courbure des surfaces d'eau ne s'observe que sur les petits volumes. En effet, lorsque le volume considéré devient trop grand, l'énergie de surface (liée à la tension de surface) évoquée dans les réponses précédentes devient plus faible que l'énergie potentielle gravitationnelle (liée au poids) de l'ensemble du liquide. Celui-ci tend alors à saplatir, afin que les particules qui le constituent soient toutes le plus proche possible du sol.
Ainsi, un lac, ou même une flaque, ne se met pas en boule, mais une goutte de rosée sur une toile d'araignée est presque sphérique. Par contre, le contenu du verre de whisky du Capitaine Haddock dans "On a marché sur la Lune" peut se mettre en boule, car à bord de la fusée lunaire, il n'y a plus de pesanteur, et le poids du whisky (et donc son énergie potentielle gravitationnelle) devient négligeable par rapport aux "effets de peau" ou "de membrane" (tension de surface) évoqués dans les réponses précédentes.
Evidemment, l'océan est sphérique, mais c'est bien à cause de la gravitation, et non de sa tension du surface; en effet, son poids l'oblige tout simplement à s'adapter à la forme de la Terre.
Notons encore que la nature du revêtement sur lequel est posée une goutte de liquide a un effet sur la taille maximale que peut avoir cette goutte sans qu'elle ne le "mouille" ; mais il s'agit encore d'un autre paramètre, qui s'ajoute aux deux premiers (tension de surface et poids).

Mon 31/01/2000 - 02:01
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francois.roby@univ-pau.fr

Je ne suis pas spécialiste en mouillage, mais je pense que la déduction que fait Frédéric Elie à partir de la divergence de la longueur capillaire est erronée.
Essayons de donner quelques images simples sans être inexact.
Pour l'eau dans le champ de pesanteur régnant à la surface de la Terre, cette longueur capillaire est d'environ 2,5 mm, ce qui représente la taille caractéristique d'une goutte avant qu'elle ne commence à "vouloir" s'étaler et accéder ainsi au statut de flaque d'eau; c'est également l'épaisseur approximative de cette flaque.

Donc si la longueur capillaire augmente, cela ne signifie pas que l'eau va se plaquer au verre, bien au contraire, mais que les gouttes peuvent être plus grosses et les flaques d'eau plus épaisses (il n'y a d'ailleurs aucune "dépression" dans l'histoire). Et lorsque la longueur capillaire tend vers l'infini, cela signifie que toutes les gouttes d'eau peuvent avoir la même forme indépendamment de leur taille : on peut avoir des gouttes de 50cm d'épaisseur ayant la même forme que les toutes petites gouttes que nous voyons quand se forme la rosée.
Bien entendu, leur comportement sera différent si on les secoue, car les forces d'inertie ne sont pas du tout les mêmes en fonction de la taille, mais à l'équilibre statique, il n'y a plus de différence. L'eau a donc bien tendance à se mettre en boule, et à "coller" un peu au verre du fait de son attirance pour celui-ci, mais non à s'étaler puisque cela augmenterait sa surface et donc son énergie.

En résumé, je pense qu'il est correct de raisonner ainsi :
qu'est-ce qui détermine la taille d'une (petite) goutte d'eau en contact avec
un solide (verre) dans notre environnement quotidien ? Réponse : les tensions interfaciales, qui contrôlent l'angle de contact de l'interface eau/air avec le verre ; et la pesanteur, qui limite l'épaisseur de la goutte et provoque le cas échéant son étalement.
Que se passe-t-il si lon enlève la gravité ? Réponse : il ne reste plus que les tensions interfaciales, et la goutte peut donc grossir sans retenue, elle ne s'étalera que si d'autres forces que la pesanteur s'en chargent.

Je profite de ma réponse pour revenir sur celle de R-E Eastes. Il est inexact de dire que "à bord de la fusée lunaire, il n'y a plus de pesanteur"; en effet, la pesanteur existe tant qu'on est dans le champ d'attraction de la planète, c'est-à-dire toujours puisque ce champ s'étend à l'infini ! Certes, l'intensité de l'attraction diminue lorsqu'on s'éloigne de la Terre, mais ce n'est pas du tout ce qui explique pourquoi tout "flotte" dans une station spatiale, qui reste elle dans la "banlieue" terrestre.
Prenons l'exemple des astronautes qu'on envoie tourner autour de la Terre, à une altitude de 375 km pour la station spatiale internationale. Cette altitude n'est pas très élevée par rapport au rayon de la Terre, qui est de 6 380 km environ, soit 17 fois plus. Ce qu'on nomme habituellement "apesanteur" n'est rien d'autre que la conséquence d'une... chute libre de la station ! Si on définit la chute libre par le mouvement d'un objet soumis uniquement à un champ de pesanteur (et pas, par exemple, à des frottements dus à l'air), alors la station spatiale est bien en chute libre : il n'y a aucune différence de nature entre le mouvement d'une station spatiale satellisée et celui d'une boule de pétanque tombant de ma main sur mon pied (en supposant négligeable la résistance de l'air dans ce dernier cas).

Et si on construisait une petite "station boulique" avec savants et instruments miniaturisés à l'intérieur de la boule de pétanque, on pourrait y observer tout autant l'"apesanteur"... le temps que dure la chute ! Plus sérieusement, on recrée cette "apesanteur" (terme décidément très impropre, mais employé par tous) pendant des temps un peu plus longs dans des avions de ligne préparés, capables de réaliser momentanément des trajectoires en forme de parabole, comme ma boule de pétanque quand je la lance...

Mon 03/03/2003 - 02:01
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