Questions to the experts

Je vous conseille de renouveler le travail sur la fusion des glaçons, et de continuer sur la solidification (à moins de faire l'inverse : commencer par la solidification ; cela n'a guère d'importance). La période hivernale qui arrive va d'ailleurs bien s'y prêter. Je vous transmets une proposition ci-dessous. Mais auparavant, et pour répondre à la suite de votre question, je peux dire que les changements d'état faisant intervenir la vapeur d'eau (évaporation, condensation) ne sont pas accessibles aux élèves de GS, pas plus d'ailleurs qu'à ceux du cycle 2. Je conseille personnellement d'attendre le cycle 3 pour s'y atteler. J'ai déjà eu l'occasion de développer les raisons de ce parti pris : Voir la question du 3/01/2000 :
comment construire la matérialité des gaz à l'école ? Il y a aussi une intervention d'Elisabeth Plé (31/03/2000) : pourquoi les enfants ne comprennent-ils pas les expériences sur l'évaporation et la condensation ? (Il est dommage que ni la question ni la réponse ne précisent l'âge de ces enfants, mais manifestement, ils sont à l'école primaire).

Un exemple pour traiter de la solidification de l'eau. Venons-en à la solidification de l'eau. Il est toujours souhaitable de ne pas en rester à la simple observation (les flaques gelées ou les glaçons sortant du réfrigérateur) mais de mettre les élèves en situation problème.

NB. Activité à réaliser obligatoirement en hiver !... À cet âge les élèves ont une perception intuitive du chaud et du froid ainsi que de son caractère relatif (il fait plus chaud ici que là...). Ils connaissent l'existence du thermomètre, mais n'ont aucun repère au niveau des températures. En particulier, ils ignorent que "l'eau gèle à zéro degré".

Introduction du problème. Partir de la question "comment faire des glaçons ?" et recueillir "en vrac", les idées des élèves en demandant des justifications. Réponses fréquentes : congélateur, bac à glace du réfrigérateur (référence aux pratiques familiales) : "parce que dedans c'est froid." Situation : on va essayer de faire des glaçons à l'école en utilisant le congélateur, le réfrigérateur, mais aussi en trouvant d'autres endroits. Recueillir les propositions des élèves. En suggérer d'autres : et si on mettait un verre d'eau dans une cave ?... dans une glacière, dans une cuvette pleine de glace, etc.

Recueil méthodique des hypothèses. Pictogrammes sur lesquelles sont dessinés différents lieux :

réfrigérateur : en bas, en haut (compartiment freezer)
congélateur
dehors : la nuit, le jour, au soleil, à l'ombre
cuvette pleine de glace

cave glacière, etc.

Les élèves, individuellement, font des prévisions (il convient d'imaginer un codage adapté à cette tranche d'âge). Synthèse des hypothèses. Mise en relief des points d'accord et des points de désaccord.

Vérification expérimentale. Elle est organisée et planifiée avec la classe. Certaines expériences peuvent être réalisées par les élèves chez eux. D'autres sont mises en place à l'école.

Bilan. Résultats positifs : dans le "freezer", dans le congélateur, à l'extérieur dans certains cas...

Résultats négatifs : en bas du réfrigérateur, dans la cuvette pleine de glace, dans la cave, dans la glacière, à l'extérieur dans d'autres cas...

Discussion.

Les élèves voudront peut-être reprendre certaines expériences qui les étonnent.

Par exemple, ils imaginent le plus souvent un résultat positif dans la cuvette pleine de glace. Si l'expérience a été faite dans la classe, ils voudront la reprendre à l'extérieur.

Le maître introduit (ou confirme) le caractère relatif de la notion de froid. Une discussion a lieu à propos du thermomètre.

Retour à une expérimentation. Les expériences sont reprises en plaçant à chaque fois un thermomètre à côté du récipient témoin.

Conclusion.

Il ne paraît pas judicieux, à cet âge d'aller plus loin. En CP les élèves apprendront à repérer des nombres sur une droite numérique. C'est seulement dans cette classe que la lecture des températures positives est possible si le thermomètre est gradué clairement (ce qui n'est pas toujours le cas).

Prolongement : donner aux élèves l'expérience sensible de la solidification de l'eau. Vous connaissez sans doute la particularité du mélange de glace pilée et de gros sel qui constitue un mélange réfrigérant : il descend facilement en dessous de 10 °C (il n'est pas rare d'atteindre 15 à 18 °C : tout dépend si l'on a la main heureuse dans le dosage de glace et de sel). Il est possible de faire geler très rapidement (quelques minutes) un peu d'eau du robinet placée au fond d'un récipient, lui-même placé dans le mélange réfrigérant (c'est la même figure que plus haut, mais avec la glace, il faut ajouter et mélanger une bonne quantité de gros sel).

Cette expérience est complètement "magique" pour des élèves de cet âge, et, en règle générale, je ne plaide pas pour des activités scientifiques non interprétables par les élèves. Mais ici, il y a une bonne raison. Si, en effet, les élèves ont largement l'expérience des glaçons qui fondent, ils n'ont jamais eu l'expérience sensible et directe, de l'eau qui gèle. Cela se passe toujours lentement, souvent la nuit ou dans le congélateur. Ainsi, mettre en œuvre cette expérience, et autoriser tous les élèves à mettre les doigts dans le récipient est intéressant parce qu'ils vont progressivement sentir la glace se former (prévoir plusieurs postes ou un travail en atelier sur plusieurs jours). C'est à mon avis la seule façon de donner une expérience sensible de la solidification de l'eau, et cela vaut bien une bonne dose de directivité...

Quelles notions ont été ainsi abordées ? N.B. Je dis bien "abordées" et non atteintes... Je n'ose pas parler de concept car la connaissance acquise est encore très fortement une connaissance sensible. Il y a la notion de changement d'état et celle de température. Mais qu'on se rende bien compte que ce n'est qu'à un niveau de formulation très élémentaire. Cela paraît évident en ce qui concerne la température dont on n'a même pas appris à la lire (mais il manque bien d'autres aspects...). En ce qui concerne le changement d'état, on peut avantageusement mettre en relation les premières activités que vous avez réalisées (fusion des glaçons) et celles-ci. Il est même souhaitable d'opérer avec la même eau : c'est l'eau de fusion des glaçons, venant du congélateur, qui est placée une nuit d'hiver sur le rebord extérieur de la fenêtre. Mais, ce faisant, vous n'aurez pas prouvé que glace et eau liquide sont une même substance. Tout ce que vous pourrez conclure c'est que la glace se transforme en eau liquide, et réciproquement.