La météorologie dans l'antiquité
Le royaume des Dieux
Très tôt, les Hommes ont essayé d'interpréter les phénomènes météorologiques qui conditionnaient et rythmaient une partie de leur existence.
Ils devaient uniquement se fier à leurs sens et affronter les colères de la nature que l'on craint moins aujourd'hui grâce à la technologie (chauffage, climatisation, etc.). Des dessins, datant de 4 à 8 mille ans, retrouvés en Écosse semblent représenter le Soleil et la Lune entourés de halos. Mais les traces de cette époque sont limitées. Les Babyloniens ont laissé des tablettes de terre cuite sur lesquelles ils gravaient des lois relatives à la météorologie, qu'ils avaient déduites de leurs observations. Par exemple ils avançaient les principes suivants : "quand le Soleil est entouré d'un halo, la pluie va tomber. Quand un nuage obscurcit le ciel, le vent va souffler".
Les Chinois furent probablement les premiers à avoir une démarche rigoureuse face aux phénomènes météorologiques : ils effectuaient des observations de manière régulière. Sous la dynastie Yin (1300 avant J.C), elles concernaient les hauteurs de neige, l'aspect du ciel, ou encore le vent.
Les Grecs, un peu plus tard se sont également intéressés à la météorologie, mais selon eux, les phénomènes étaient régis par les Dieux. Ainsi, les évènements néfastes à l'Homme (tempêtes, orages, sécheresse, etc.) étaient considérés comme la manifestation de forces surnaturelles, conséquences de la colère des Dieux ou alors de leur bienveillance. Par exemple Zeus gouvernait l'orage, l'ouragan et la foudre. Chez les Hindous, Indra tenait le même rôle.
Dans l'Égypte ancienne, les crues représentaient l'union d'Isis et d'Osiris, qui donna naissance à Horus.
En Mésopotamie, dès le IIIe millénaire avant notre ère régnait la déesse de la pluie : elle écartait les bras pour laisser s'écouler le flot d'eau irriguant le sol.
Pendant très longtemps, l'humanité a fait confiance aux sorciers qui devaient prédire le temps. Ainsi, durant les périodes de sécheresse, les danses et les sacrifices se faisaient nombreux afin de faire tomber la pluie.
Pendant une longue période, les phénomènes météorologiques étaient donc interprétés comme volonté des Dieux, et les Hommes se sont tout au plus contentés de les observer sans chercher à les comprendre.
L'éveil de la raison
Comme dans beaucoup de domaines de la connaissance, les Grecs furent les premiers à adopter une approche d'analyse et d'explication rationnelle des phénomènes météorologiques. Notons qu'à cette époque, la météorologie regroupait un large éventail de domaines comme l'astronomie, la géographie ou encore la sismologie.
Le premier philosophe ionien Thalès de Milet voyait le monde comme une bulle d'air piégée dans un univers liquide infini. Il reliait les mouvements de l'atmosphère à ceux des sphères lointaines.
Anaximandre (610-546 avant J.C) avait déjà une idée précise de la nature du vent. Il pensait que le vent était un flux d'air.
Au Ve siècle avant J.C, un autre Ionien, Anaxagoras, a donné un schéma de la formation des précipitations. Selon lui, l'air entraîné en altitude se condensait en grêlons lorsque la température était suffisamment basse.
Empédocle établit la théorie des quatre éléments (terre, eau, air, feu) dont les combinaisons devaient être à l'origine du froid, de la chaleur, de l'humidité et de la sécheresse.
L'œuvre d'Aristote (384-322 avant J.C), rédigée au IVe siècle avant J.C, garda un poids considérable pendant une longue période. Dans Les Météorologiques , il a étudié la plupart des phénomènes atmosphériques et a tenté de donner une explication à certains phénomènes tels que le cycle de l'eau et le vent. Notons qu'il y a également abordé tous les phénomènes se déroulant dans la région sublunaire (la voie lactée, les arcs-en ciel, les tremblement de Terre) et quelques aspects de la chimie comme les changements d'état ou encore la combustion. Pour Aristote, l'exhalaison que la chaleur du Soleil extrait de la Terre régit les phénomènes atmosphériques. Aristote comprend que la formation des nuages nécessite une baisse de la température. Il pense, très justement, que la rosée, les brouillards, la grêle, la neige et la pluie sont les différents aspects d'un même phénomène: la condensation. Simplement, il se trompe quand il considère que l'air voit sa température augmenter avec l'altitude et explique ce phénomène par la présence d'une couche d'éther plus chaude au sommet de l'atmosphère. Ainsi, il pense que la grêle se forme au voisinage de sol, après la traversée de régions de plus en plus froides lors de la descente des gouttelettes d'eau.
Après la chute de l'empire romain, la météorologie fut délaissée, et ce , jusqu'à la Renaissance.
Le royaume des dictons
Après Aristote, et ce jusqu'au XVIIe siècle, il n'y a pas eu de grands bouleversements au niveau des connaissances relatives à la météorologie. Ses successeurs se sont limité à des commentaires et à des études sur son uvre.
Par ailleurs, au fil des siècles, notamment au Moyen Âge, les connaissances accumulées durant l'antiquité disparaissent ou sont déformées. A partir du XVe siècle des recettes dérivées des connaissances antiques, complétées par des observations plus ou moins rigoureuses, aboutissent à une pseudo-science matérialisée par des dictons. De nombreuses publications sur des conseils et des astuces pour mieux utiliser et gouverner les phénomènes météorologiques voient le jour. Par exemple, on détermine la date la plus judicieuse pour se faire couper les cheveux, le tout relié au temps qu'il fait. Les vents, les tempêtes, la sécheresse, trouvent leur origine dans les signes du zodiaque.
Les sorciers tiennent le monopole dans la prédiction du temps. Avant même d'en comprendre les mécanismes, on a essayé de prévoir le temps! A l'époque, on pensait qu'il fallait observer le temps qui passe pour prévoir le qu'il fait. Ainsi, on a attribué à chaque Saint du calendrier des pouvoirs sur la météorologie, sous forme de dictons. Ces derniers étaient construits par rapport à la vie de martyr du Saint, à une moyenne climatique, à des traditions païennes ou encore à une rime facile:
"Quand il pleut à la Saint-Médard
Il pleuvra 40 jours plus tard.
A moins que Saint-Barnabé lui coupe l'herbe sous les pieds..
Mais Saint-Gervais peut y mettre la paix."
Notons que les dictons, s'ils manquent pour la plupart de rigueur scientifique, ne sont pas tous dépourvus de sens. Ainsi "Lune cerclée, pluie assurée" provient d'une observation simple : le halo nécessite la présence de cirrostratus, dont les cristaux de glace qui les constituent diffusent la lumière du Soleil. Or les cirrostratus précèdent de quelques heures les nuages générateurs de pluie. Une explication scientifique se cache donc derrière, mais ce genre de dictons a une portée limitée dans la mesure où ils ne s'adaptent qu'à des situations ponctuelles mais ne permettent pas de comprendre le mécanisme des phénomènes.
La naissance de la météorologie moderne
La fin de l'empirisme et des dictons
L'idée d'effectuer des observations régulières comme base de travail en météorologie est relativement récente. Un médecin Bergerac est le premier à avoir pensé à publier un journal météorologique mais il n'a pas concrétisé son idée. Vers 1760, Lavoisier établit les premières lois pour prévoir le temps:
"La prédiction des changements qui doivent arriver au temps est un art qui a ses principes et ses règles, qui exige une grande expérience et l'attention d'un physicien très exercé. Les données nécessaires pour cet art sont : l'observation habituelle et journalière des variations de la hauteur du mercure dans le baromètre, la force et la direction du vent à différentes élévations, l'état hygrométrique de l'air. Avec toutes ces données, il est presque toujours possible de prévoir un jour ou deux à l'avance, avec une très grande probabilité, le temps qu'il va faire; on pense même qu'il ne serait pas impossible de publier tous les matins un journal de prédictions qui serait d'une très grande utilité pour la société."
La météorologie moderne est née d'un naufrage lors de la guerre de Crimée (1853-1856). Le 14 novembre 1854, une violente tempête fut à l'origine de la perte de 38 navires de commerces; 400 marins périrent dans cette catastrophe. Ceci amena le Ministre de la guerre à charger l'astronome Urbain Le Verrier (1811-1877) de trouver les causes de ce désastre. Le Verrier est considéré comme le père de la météorologie moderne. En effet, il découvre que les événements météorologiques en un lieu donné sont le résultat d'un déplacement, à l'échelle planétaire, de phénomènes physiques. Le Verrier s'aperçoit que la tempête existait déjà le 12 novembre mais à un autre endroit : le Nord Ouest de l'Europe. Elle s'est donc déplacée en trois jours vers Sud Est. Le Verrier décide alors de mettre en place un réseau qui permettrait de localiser les événements dangereux pour mieux s'y préparer . En 1865, le réseau européen compte déjà 59 stations. Les différentes mesures effectuées démontrent que les variations des caractéristiques du temps qu'il fait (température, vent, précipitations etc.) sont liées aux variations des mesures du baromètre. On établit alors des cartes où l'on trace des lignes isobares. On constate que le vent se déplace parallèlement à ces lignes. Or le vent est le moteur des nuages. On en déduit que leur déplacement est entièrement déterminé par la connaissance des lignes isobares. C'est le début de la prévision météorologique. Simplement les résultats ne sont pas concluants. Ceci s'explique par le fait que les observations de l'époque ne sont pas complètes:-elles sont effectuées au sol. Or ce sont les vents d'altitude qui déplacent les nuages, ces vents ne soufflant pas dans la même direction que ceux aux sol.
-on ne tient pas compte du relief , qui a une influence sur la caractéristiques du vent.
Des améliorations furent donc nécessaires pour l'application de cette méthode appelée "chemin de fer", qui fut utilisée jusqu'en 1970:
- on a pris en compte le relief.
- des stations météorologiques sont placées dans les navires pour mieux connaître le temps au-dessus des océans.
- les pilotes de ligne fournissent des renseignements sur leurs conditions de vol. Le rôle de l'altitude est alors mis en évidence.
- des ballons sonde sont lâchés à partir de 1900 afin d'avoir des informations sur l'humidité, le vent et la température en altitude.
La naissance de la prévision numérique
Au début du XXe siècle, un météorologiste norvégien, Bjerkness, eut l'idée d'étudier l'atmosphère à partir des lois de la thermodynamique et de la mécanique des fluides. Durant la première guerre mondiale, Richardson, un scientifique anglais mit en pratique cette idée. Il passa de longues années à effectuer d'énormes calculs dont le résultat fut un échec total dû à la méconnaissance, à l'époque, de techniques de calcul adéquates. L'idée fut alors abandonnée.
En 1939, Rossby, un météorologiste suédois simplifia les équations, ce qui facilita les calculs, en plus de l'utilisation du calcul électronique. L'idée de Richardson fut développée à la fin de la seconde guerre mondiale. En 1949, Von Newman, un scientifique américain, donna les premiers résultats satisfaisants du calcul numérique appliqué aux lois atmosphériques.
Dans les années 60, les progrès de l'informatique permirent le développement de la prévision numérique, seule méthode utilisée de nos jours.